Aujourd'hui doyen des Allemands, Heinrich Uffen (personnage fictif) a été, de 1943 à 1945, le cuisinier d'Hitler. A 108 ans, il traîne sa carcasse d'hôpitaux en maisons de retraite, où ses souvenirs le harcèlent. Le monologue intérieur, qui se déploie au long du roman, montre le rapport compliqué, sincère ou complaisant, de Uffen avec son passé ; sa relation d'étrangeté avec l'Allemagne contemporaine ; et son lien de plus en plus ténu avec le réel. Au fil de ce monologue envoûtant, Uffen multiple contradictions et ambiguïtés : s'il n'a servi Hitler, qu'il traite de monstre ou de diable, qu'à la suite d'un incroyable concours de circonstances, il confesse aussi l'avoir aimé. Il estime n'être pas plus coupable, par exemple, que les cadres subalternes du Parti. Il avoue enfin qu'il a sauvé la vie à Hitler, le 20 juillet 1944, et qu'il s'estime responsable du prolongement de la guerre, avant de regretter que Churchill ait choisi de s'allier à l'URSS plutôt qu'au Reich... Ce texte aux profondes harmoniques a pour objet la question du Mal et de la culpabilité. Il trouve son origine dans l'intérêt soutenu de l'auteur pour l'histoire du vingtième siècle, les régimes totalitaires et la seconde guerre mondiale. Le Diable dans l'assiette a demandé six ans de travail ; c'est le deuxième roman de Laurent Saulnier.
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